Hilarion Roux & Cie

En avril 1864, le Marseillais Hilarion Roux, le Romagnol Jean-Baptiste Serpieri et l’Épirote Georges Pachi fondent à Marseille une société en commandite simple d’un capital de 600 000 francs (raison sociale Hilarion Roux & Cie). Son objet est le traitement métallurgique des scories du Laurium, c’est-à-dire les déchets des fonderies de plomb ayant fonctionné durant l’Antiquité. L’entreprise est soutenue financièrement par plusieurs maisons de commerce marseillaises, dont celle des Rodocanacchi, ce qui lui permet de contracter un emploi d’un million de francs pour développer ses infrastructures et recruter son personnel, sur place et à l’étranger. Hilarion Roux, le gérant de l’affaire, et Jean-Baptiste Serpieri, initiateur de l’opération avec son père Enrico, bénéficient d’une expérience dans ce type de travaux. Le premier a en effet déjà traité des scories plombifères en Espagne, à Escombreras, près de Carthagène, tandis que le second a fait de même en Sardaigne, à Domus-Nova, Villamassargia et Flumini-Maggiori. Les trois commandités ont acheté la propriété des gisements de scories aux habitants et aux villages de la région du Laurium, notamment à Ergastiria, Kératia et Thériko.

La société construit ses installations industrielles au cours de l’année 1864 et se dote de machines et de chaudières à vapeur construites par des entreprises de mécanique de Paris et de Marseille. Elle commence à exporter ses productions dès 1865, principalement vers la Grande-Bretagne et Marseille, les deux grands centres de désargentage des plombs du moment. À plein régime, l’entreprise emploie près de 1 500 ouvriers et sa production atteint quelque 10 000 tonnes de plombs bruts d’une teneur allant de 360 à 440 grammes d’argent par tonne. Les scories sont traitées dans des fours à manche castillans, avec l’aide d’ouvriers fondeurs (gacheros) venus d’Espagne par l’intermédiaire d’Hilarion Roux et de son beau-frère Eduardo Aguirre, directeur d’exploitation en Attique. Ces travailleurs sont regroupés dans une cité ouvrière spécialement construite pour eux et baptisée Spaniolika. En 1869, une ligne étroite de chemins de fer dotée de trois locomotives à vapeur est mise en place par Charles Ledoux, futur fondateur de la multinationale Peñarroya, pour relier les différents sites de l’établissement.

La même année, la société dépasse son objet initial en se lançant dans le traitement des ecvolades, les terres plombifères extraites durant l’Antiquité et laissées à la surface en attente de traitement ou abandonnées à cause de leur faible teneur en plomb. L’exploitation doit s’interrompre avec une loi votée en mars 1871 par la chambre des députés grecs. Le mois suivant, les ecvolades sont déclarées propriété nationale et l’État hellénique entend faire respecter ses nouveaux droits. La société Hilarion Roux Cie en appelle aux gouvernements français et italien pour s’opposer à la nouvelle législation, ouvrant une crise diplomatique riche en péripéties et qui dure plusieurs années. Les tentatives de médiation ne permettent pas à l’entreprise de reprendre les travaux, mais ouvrent la voie à un compromis financier. En 1873, la Société des usines métallurgiques du Laurium, entreprise grecque, est créée sous l’impulsion du banquier Andréas Syngros avec un capital de 20 millions de drachmes, dont 11,8 devant servir au rachat des concessions et des usines de la société Hilarion Roux & Cie. Hilarion Roux et Jean-Baptiste Serpieri ont perdu l’exploitation des scories et des ecvolades, mais n’entendent pas pour autant quitter le secteur minéro-métallurgique en Grèce. Ils participent en 1875 à la création de la Compagnie française des mines du Laurium, société qui mise, contrairement à la précédente, sur l’exploitation de concessions minières et le traitement des minerais de plomb (galènes argentifères).

Par son importance et son caractère précoce, la société Hilarion Roux & Cie est emblématique de la présence française dans l’économie et l’industrie grecques au cours de l’époque contemporaine. Elle est aussi à l’origine de la fièvre minière qui s’empare de la Grèce durant le dernier tiers du XIXe siècle et de l’intégration du pays dans le système et les circulations techniques de la première révolution industrielle européenne.

Siège social
Marseille
Secteur d'activité
Activité en Grèce
Métallurgie
Lieu d'exercice
Date de fondation
1864
Date de dissolution
1873

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