La S.A. d’Explosifs et Produits Chimiques (EPC) a été fondée en 1893 à Paris par Eugène Jean Barbier. Sa première dynamiterie a été construite dans le Sud de la France, à Saint-Martin-de-Crau (Bouches du Rhône). De vocation internationale, la EPC s’implante dès ses débuts en Grèce, un choix qui peut être expliqué par la présence d’entreprises minières françaises dans ce pays. En mai 1893 donc, est créée à Paris la première filiale de la EPC, la Société Franco-hellénique d’Explosifs et de Produits Chimiques (SFHEPC), d’un capital de 200.000 francs et d’une durée de 30 ans. La démarche avait été précédée de peu par la construction d’une usine de dynamite à Koukouvaounes, à une vingtaine de kilomètres au nord de la capitale, par un entrepreneur anglais, Charles Henry Hone. Ce dernier, né à Corfu et habitant à Athènes, avait acquis le permis nécessaire pour la fabrication de la dynamite. En cédant cette usine, avec les marchés déjà attribués à la SFHEPC, Hone en a acquis la moitié du capital social et a été nommé administrateur délégué de la société en Grèce. La EPC y a souscrit pour 32,5% tandis que Eugène Jean Barbier, nommé président de la filiale, et les autres actionnaires, se sont partagés le reste des actions.
L’usine de Ktipito, sur la route liant Athènes à Tatoi, comprenait des ateliers de fabrication de nitroglycérine et de dynamite (pétrissage, cartouchage), une machine à vapeur et des dépôts. L’installation a été renouvelée à deux reprises jusqu’à 1910 pour se conformer aux règles de sécurité en vigueur en Grèce. Entre temps, en 1898, Charles Hone avait quitté la société et la direction de l’usine fut confiée à l’ingénieur Robert Gross, puis en 1908 à l’ingénieur Gustave Guiol, membre du Conseil, représentant de la société en Grèce et qui demeura à son poste jusqu’aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale.
La Belle Epoque a été une période de prospérité pour la SFHEPC, grâce au développement spectaculaire du secteur minier en Grèce. L’entreprise proposait une gamme élargie de produits (poudres de diverses sortes, capsules et détonateurs, acides) avec lesquels elle alimentait les mines et carrières du pays. Une partie de la production était exportée, via Syra. Son client privilégié était sans doute la Compagnie Française des Mines du Laurium. Dès 1894, la SFHEPC avait son propre dépôt de dynamite près des puits de Kamariza. En 1910, le capital social a été porté à 500.000 francs, tandis que la société-mère, la EPC avait alors étendu son réseau de filiales et d’usines, en France (avec une deuxième usine à Billy-Berclau, dans le Pas-de-Calais) et à l’étranger, en Italie (2 usines), à Londres, en Russie et en Espagne.
Au cours des années 1920, l’extension du territoire national grec a permis à la SFHEPC (renouvelée en 1926 pour 50 ans encore) d’ajouter à sa clientèle les mines de Chalkidiki et d’ouvrir une agence à Thessaloniki. La dépression de la décennie suivante provoque une baisse de l’activité. Par ailleurs, les restrictions imposées à l’exportation des devises empêchent la distribution des dividendes à partir de 1931. L’entreprise réagit en mettant en oeuvre un appareillage nouveau pour la production des détonateurs, une innovation pour laquelle elle obtient un privilège d’exploitation en Orient. Le personnel de l’usine comptait alors 50 ouvriers et 20 employés, et la production était destinée exclusivement au marché grec (mines et travaux publics).
Confisquée pendant l’Occupation, l’usine a fonctionné pour le compte des Italiens jusqu’en 1943. Ensuite la production a cessé et l’installation, servant d’entrepôt aux Allemands, a subi de sérieux dégâts. Seul fut sauvé le nouvel atelier des détonateurs, qui fut la base du redémarrage de la production après la guerre. En manque de capitaux pour financer ce redémarrage (l’apport de capitaux de la société mère étant entravé cette fois par des restrictions du côté français), la société demande en 1946 18 millions de drachmes au titre des réparations pour les dégâts subis. Il n’est pas certain qu’elle ait obtenu gain de cause, mais ses travaux ont bientôt repris de plus bel. La SFHEPC jouissait d’une bonne réputation dans les milieux bancaires de la Grèce. En 1954, elle est classée au second rang des entreprises de la branche des explosifs (une dizaine en tout), surpassée seulement par la Poudrerie-Cartoucherie de Bodossakis. La représentation de la société en Grèce a été confiée après la guerre à un Grec, Adamantions Kalogeropoulos.
L’urbanisation de la région de Koukouvaounes durant l’après-guerre a obligé l’entreprise à abandonner Ktipito en 1968/69 pour s’installer près de Thèbes. En dehors des explosifs nitratés traditionnels, la production comprenait, à partir de 1973, un explosif mis au point par le groupe EPC, le « Sigma ». En 1982, la société, au capital de 4 millions de francs détenu exclusivement par EPC s’est transformée en S.A. grecque sous la raison sociale « Société Franco-hellénique, Industrie et Commerce d’Explosifs et Produits Chimiques », siégeant à Athènes et d’une durée de 10 ans. C’est probablement à l’expiration de cette échéance que la société a cessé son activité en Grèce. En tout cas, en 1992, ses installations près de Thèbes ont été rachetées par une entreprise d’explosifs grecque, ELVIEMEK, fondée en 1945. De nos jours, cette dernière ayant cessé ses activités productives, un parc photovoltaïque a été créé sur les lieux.
Sources-Bibliographie
Archives Helléniques Littéraires et Historiques (ΕΛΙΑ), A.E. 23/12 (SFHEPC)
Archives Générales de l’Etat (ΓΑΚ) - Archives de la Municipalité de Hermoupolis, série Δ/Α (Βιομηχανικές εταιρείες και οίκοι - Sociétés industrielles), dossier 2
Archives Historiques de la Banque Nationale de Grèce, 1/36/29/822, 1/34/03/10, 1/20/52/297
Εφημερίς της Κυβερνήσεως (Journal Officiel du Gouvernement), No 162/20 août 1892 (statuts de la SFHEPC)